Critique de « Python » de Nathalie Azoulai

« Python » de Nathalie Azoulai est un roman dans lequel une autrice quinquagénaire veut comprendre le développement informatique. D’une formation littéraire, elle aborde cette technique inconnue pour elle avec une perspective poétique et fantasmée. Fascinée par les jeunes développeurs qui passent des heures à écrire et à corriger des programmes dans un langage qui lui est étranger, elle décide de s’initier à la programmation. Elle s’entoure de divers professeurs particuliers pour lui expliquer les concepts du code informatique.

L’approche initiale est intéressante car elle déconstruit les clichés des développeurs asociaux absorbés par leurs écrans, en les transformant en objets de mystère et de fascination, avec de nombreux parallèles littéraires. Elle tente de percer les secrets de la programmation, de comprendre la logique du code informatique et les raisons pour lesquelles des personnes se passionnent pour cette discipline au point d’en oublier le temps et la réalité. Elle démystifie des concepts comme les conditions (if/elif/else), les boucles (for/while) et, de manière plus surprenante, le PageRank de Google.

Cependant, on reste sur sa faim car l’autrice ne s’engage finalement pas réellement dans la programmation. Elle aurait pu aller plus loin qu’un HelloWorld en essayant par exemple de programmer le célèbre jeu de la vie et partager l’expérience concrète de voir son code échouer et de passer des heures à le corriger. Elle aurait ainsi touché du doigt la recherche d’optimisation mais aussi d’esthétisme du code informatique, un sujet qu’elle effleure à peine. Ce sujet est d’ailleur abordé dans l’épisode “Esthétique du code” du podcast “Le code a changé” …où Nathalie Azoulai est invitée !

De plus, elle glorifie excessivement les entrepreneurs de start-up de la Silicon Valley. Elle introduit aussi brièvement la notion d’intelligence artificielle, mais l’aborde de manière simpliste en la rattachant trop rapidement à ChatGPT et en répétant les stéréotypes sur le remplacement des développeurs par des machines. De plus, elle dessine un portrait des développeurs comme étant principalement de jeunes passionnés, omettant de mentionner qu’il existe aussi de nombreux développeurs expérimentés (certes plus difficile à cotoyer). Enfin cette vision idyllique des développeurs parlant des langues mystiques occulte les problématiques systémiques de la profession : le sexisme et la disparité de genre et de classe dans les formations et les entreprises.

Au final, « Python » de Nathalie Azoulai est un ouvrage intéressant qui propose une approche originale de la programmation informatique. À conseiller à toutes les personnes n’étant pas développeuses, ce qui fait quand même pas mal de monde. Et chapeau à Nathalie Azoulai qui a apparemment vraiment échangé avec Guido van Rossum, l’inventeur du langage Python !

Comments are closed.