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On peut être élu maire de Marseille avec 18% des votes

Monday, March 9th, 2020

En France, le système de vote pour choisir le maire des grandes villes (Paris, Lyon et Marseille) est particulièrement mal fait. Focus sur le cas de Marseille.

Il y a 863.310 habitants à Marseille, et 505.068 inscrits sur les listes électorales. Marseille est découpée en 8 secteurs et 16 arrondissements (I: 1er/7e, II: 2e/3e, III: 4e/5e, IV: 6e/8e, V: 9e/10e, VI: 11e/12e, VII: 13e/14e et VIII: 15e/16e)…en fait il y a une élection par chaque secteur, soit 8 élections distinctes ! Pour chaque secteur, une liste se présente pour décrocher entre 8 et 16 conseillers municipaux. Première anomalie, la répartition n’est pas égale : dans le secteur I (1er/7e), un conseiller représente environ 4000 habitants, alors que dans le secteur VI (11e/12e) c’est environ 6000 habitants ! Si l’on prend les chiffres des municipales 2014, la proportion de votes exprimés / conseiller municipal au 2e tour était de 1891/1 dans le secteur II (2e/3e) et 3387/1 dans le secteur VI (11e/12e), presque le double !

Mais la plus grosse anomalie est la suivante : dans chaque secteur, la liste qui ­obtient la majorité (absolue au premier tour ou relative au second tour) remporte un bonus de la moitié des sièges. Par exemple, avec 51% des voix dans un secteur de 12 conseillers municipaux, vous en remportez 9 (soit 75% des sièges) ! L’idée de ce système de bonus – qui date de 1982 par un certain… Gaston Deffere – est d’éviter un blocage si quelques conseillers changent d’avis MAIS cela n’a aucun sens dans une élection découpée en 8 secteurs et où très peu de pouvoirs sont accordés aux maires de secteur. Conséquence ? Il suffit de remporter quelques secteurs pour avoir assez conseillers municipaux et choisir son maire alors que l’on n’est loin d’être majoritaire à l’échelle de la ville !

Enfin, comme l’explique bien Marsactu, l’élection finale du maire de Marseille se joue au 3e tour avec les 101 conseillers municipaux élus. Cela peut notamment se jouer avec la majorité relative.

Prenons quelques exemples théoriques en se basant sur les chiffres des municipales 2014 : un parti pourrait présenter des listes que dans 5 secteurs, obtenir 51% des voix exprimées au second tour, et envoyer 43 conseillers municipaux ce qui serait sûrement suffisant pour choisir son maire. Si ces secteurs sont les I, II, III, VII et VIII, cela représenterait uniquement 71.351 votes sur un ensemble 271.347 soit 26% ! Et vu le nombre de listes différentes en 2020, on pourrait même imaginer que sans le secteur VII, cela donnerait 31 conseillers municipaux ce qui pourraît être suffisant en imaginant 3 autres listes concurrentes remportant 20 conseillers chacune. Dans ce cas, le maire serait élu avec seulement… 18% des votes exprimés au second tour ! Soit 9% des inscrits, et à peine 6% des habitants marseillais !!

On comprend mieux pourquoi certains partis se contentent de parler à leur base électorale sans avoir vraiment besoin d’élargir, comme le Front National qui est en roue libre sur les allusions et propos racistes, et LR qui défile sur les terrains de boules et dans les églises mais ne prend même pas la peine de répondre à Marsactu. On comprend aussi pourquoi il y a des secteurs-clé, et même certains bureaux de vote particulièrement importants ce qui engendre de la fraude en tout genre.

Pour conclure, il est toujours étonnant que l’on parle autant des élections mais sans réellement mentionner que le système de vote est mal fait. Pourtant des meilleurs systèmes de vote existent, comme le scrutin de Condorcet (utilisé notamment par le projet Debian), le jugement majoritaire (explications dans ces vidéos) ou encore le concept de démocratie liquide. En attendant, reste à se rabattre sur le vote stratégique…

[1er avril] Evolix pivote et devient une brasserie de bières libres

Sunday, April 1st, 2018

Il faut se rendre à l’évidence, Evolix a échoué en tant que start-up… après plus de 14 ans d’existence, nous avons raté le train de l’hyper-croissance : nous ne sommes ni une scale-up ni une licorne… Après de nombreux brainstormings ces derniers mois, nous avons choisi de pivoter l’activité d’Evolix : arrêter l’infogérance de serveurs Linux et se lancer dans le brassage de bières libres !

Nos bureaux à Marseille sont actuellement en pleine refonte : nous avons mis en place plusieurs cuves et nous installons un fablab « smart city » avec une business unit de 13 personnes spécialisées en IOT pour créer une biotechnologie de smarts canettes (grâce à une capsule connectée pour intéragir avec notre BigBrother local pour alerter en cas de consommation abusive). Nous prévoyons également la mise en place d’un incubateur pour disrupter le marché de la bière artisanale grâce à l’intelligence artificielle et au big data, et une école pour former de futurs startupers sur la sous-bockchain (une technologie inspirée de la blockchain pour produire des sous-bocks). Évidemment nous serons présents au CES de Las Vegas en 2019 pour présenter avec doigté toutes ces innovations digitales.

D’un point de vue financier, nous avons arrêté un business plan avec une levée de fonds de 100 millions d’euros auprès de VC californiens dans un premier temps, puis grâce à la puissance de frappe de la French Tech nous pensons nous faire racheter par Google (ou alors racheter nous-même Google si notre business marche vraiment bien). Si vous êtes intéressés à participer au premier tour de table, contactez nous qu’on vous pitch tout ça !

Stage de 3ème, et si on changeait la donne ?

Friday, October 27th, 2017

En 2014, mon premier minot est passé en 3ème. J’ai alors réalisé combien il est difficile de décrocher un stage sans bénéficier d’un piston. Le collège pousse les adolescents de 14/15 ans à s’intéresser au monde du travail, et voir comment les entreprises traitent les collégiens est désespérant. Ces jeunes sont pourtant les travailleurs de demain, et leur donner une mauvaise image du monde du travail est terrible pour la Société ! J’ai donc décidé de prendre au moins un stagiaire de 3ème par an à Evolix, et je me suis rendu compte qu’au-delà du bénéfice sur le long terme, cela avait aussi un aspect positif à court terme ! Je vais essayer de vous convaincre.

Le stage de 3ème, c’est important. Les choix d’orientation se posent dès le début du lycée, et le premier contact avec l’entreprise et le monde du travail est déterminant. À un âge où le collégien ne sait pas quoi faire comme métier, il va maladroitement taper aux portes des entreprises : ne pas lui répondre ou lui claquer la porte au nez va limiter ses perspectives ! Au final, la majorité des collégiens ne trouve un stage que grâce à leur entourage familial : stage avec un parent, stage trouvé grâce à du piston…

Les entreprises doivent jouer le jeu. Il faut donner une bonne image du monde du travail aux futurs travailleurs… qui seront peut-être salariés de l’entreprise dans quelques années ! L’effort n’est pas très élevé : proposer d’accueillir au moins un élève pendant 4 ou 5 jours en décembre. Avec de plus en plus d’offres de stage publiques, on peut établir un cercle vertueux. Et à court terme, ce n’est même pas une perte de temps : un stage d’observation permet à plusieurs salariés de prendre du recul sur leur travail pendant quelques heures, tout le monde est gagnant !

Il faut diffuser les offres de stage. La première étape est de mentionner les offres sur son site web, l’utilisation d’un moteur de recherche étant le moyen le plus répandu pour trouver son stage. Ensuite, on peut contacter les collèges les plus proches pour qu’ils transmettent les offres aux élèves. Enfin il existe des plateformes pour émettre plus largement comme ViensVoirMonTaf à Paris, ou StagePourTous et DegunSansStage à Marseille. Je vous encourage notamment à utiliser l’initiative que j’ai lancé il y a 2 ans : StagePourTous, le principe étant de s’engager à choisir les stagiaires sans discrimination, par exemple par un tirage au sort.

Comment organiser un stage de 3ème dans une petite entreprise ? Une fois convaincu de l’intérêt du stage de 3ème, se pose la question de son organisation. En général le stage doit durer 30h, donc on limite à 4 jours. Chaque jour se passe avec une personne différente : le matin, obervation du travail et 15 minutes d’entretien ; l’après-midi, description de la journée sur un blog WordPress privé (très facile à créer). Si besoin, quelques tâches supplémentaires possibles : faire une revue de presse de l’entreprise en faisant des recherches sur Internet, s’exercer sur Code.org ou CodeCombat. Bref, pour toute entreprise d’au moins 4 salariés, l’organisation d’un stage de 3ème est vraiment simple, alors plus d’excuse, lancez-vous !

Érablière et cabane à sucre

Tuesday, March 15th, 2016

À l’occasion d’un petit périple dans les Laurentides, j’ai découvert les secrets de fabrication du sirop d’érable, je vous fais partager.

foret

Le sirop d’érable est recueilli uniquement pendant deux mois (le « temps des sucres ») chaque année à la fin de l’hiver. C’est grâce à un climat spécifique au nord de l’Amérique que se produit un phénomène naturel : les érables hibernent l’hiver puis vers mars/avril, pendant une période où l’arbre dégèle en journée (t° positive) puis gèle la nuit (t° négative), de l’eau se met à circuler dans l’érable à proximité de l’écorce. La récolte de cette eau d’érable se faisait par les amérindiens puis les colons européens ont adopté cette pratique. Le principe est de pratiquer une entaille pour faire couler l’eau contenant 1 à 2% de sucre dans un récipient, qu’il faudra faire bouillir pour obtenir le fameux sirop (30 à 40L d’eau d’érable donne 1L de sirop). Au 19ème siècle, la technique de récolte s’améliore et l’on place désormais un seau sous une petite lame concave située à la base de l’entaille (un « chalumeau »). Voici un chalumeau et une chaudière (seau en aluminum) :

chaudiere

La récolte était donc un travail gigantesque : cela consiste à vider les milliers de seaux dans un grand chaudron une à plusieurs fois par jour. Il fallait ensuite faire bouillir le chaudron dans une cabane au centre de la forêt : la « cabane à sucre ». Cela nécessitait de la main d’œuvre et traditionnellement des familles se rassemblaient pendant le temps des sucres pour récolter l’eau d’érable et manger de copieux repas. Dans les années 1970, la récolte s’est industrialisée : au mois de février, les milliers d’entailles sont réalisées à la perceuse et au marteau par des acériculteurs en raquette.

Les entailles sont reliées avec des tuyaux bleus sous pression qui forment une immense installation (« tubulure ») au travers de la forêt d’érables à sucre.

tubulure

Tous ces tuyaux aboutissent à une station de pompage située au point le plus bas de la forêt.

station_pompage

L’eau d’érable est filtrée puis renvoyée vers la cabane à sucre au centre de la forêt. On y trouve l’évaporateur chauffé au bois pendant des heures chaque jour pour faire bouillir l’eau d’érable qui arrive en continu, et le matériel pour mettre le sirop d’érable final en boîte de conserve (c’est le format le plus classique).

evaporateur

Il est intéressant de noter qu’au début du temps des sucres, on obtient du sirop d’érable clair, puis il s’assombrit petit à petit, pour devenir ambré et enfin foncé. Officiellement il y a 5 catégories : extra-clair, clair, moyen, ambré et foncé). Quand le sirop devient trop foncé, il devient amer : c’est le signe qu’il commence à contenir de la sève d’érable et c’est la fin du temps des sucres. Voici les différentes catégories de sirop d’érable tout au long de la saison des sucres :

categories_sirop

Aujourd’hui, il y a besoin de moins de main d’œuvre pour la récolte de l’eau d’érable, mais une tradition est restée : pendant deux mois de récolte, les cabanes à sucre se transforment en restaurants familiaux, où l’on mange copieusement un menu unique servi à volonté dans une ambiance traditionnelle. Au menu, de la gastronomie québécoise : réduit d’érable (de l’eau d’érable légèrement bouillie), crétons, soupe aux poix, fèves au lard, jambon à l’érable, oreilles de « criss », beignets, grands-pères dans le sirop, œufs dans le sirop, etc.

restaurant

Et pour digérer le repas, on termine par de la tire d’érable : cela consiste à verser sur de la neige du sirop d’érable chaud et très sucré (il est bouilli d’avantage que le sirop d’érable classique) et le déguster avec un bâton, ce qui donne une sorte de bonbon glacé à l’érable :

tire

C’est ce qu’on appelle se sucrer le bec!